Code du patrimoine, Livre VI, Titre V article L. 650-1 :
“Les immeubles, les ensembles architecturaux, les ouvrages d’art et les aménagements, parmi les réalisations de moins de cent ans d’âge, dont la conception présente un intérêt architectural ou technique suffisant reçoivent un label par décision motivée de l’autorité administrative, après avis de la commission régionale du patrimoine et de l’architecture.”
Parmi les évolutions qu’apportent la loi n° 2016-925 du 8 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine, dite loi LCAP, et ses décrets d’applications, le volet architecture, qui n’a pas l’importance de ce qui touche aux espaces protégés, est, du coup, resté relativement dans l’ombre malgré des apports tout à fait significatifs, notamment pour ce qui est de la valorisation. Il est vrai qu’un « livre VII » spécialement dédié à l’architecture, aurait eu plus de panache et lui donnerait au moins symboliquement l’autonomie qu’elle mériterait… En rêvant de cette future consécration institutionnelle, il faut donc se satisfaire d’un « Titre » supplémentaire dans le livre VI mais, ne boudons pas notre plaisir, l’essentiel est tout de même le contenu.
Le volet architecture de cette loi touche en fait à de nombreux sujets dont une partie vise à donner plus de lisibilité à la profession et tente par là de lui élargir un tant soi peu le champ d’intervention. Citons pour ce point l’abaissement à 150 m2 du seuil de recours obligatoire à un architecte, la réduction des délais d’instruction du permis de construire pour les demandeurs ayant eu recours à un architecte, le recours obligatoire à un architecte pour les lotissements dont la surface de terrain à aménager est supérieure à 1 500 m2 ou encore la signature obligatoire des bâtiments par l’architecte auteur du projet architectural …
Pour ce qui est de la valorisation de l’architecture, la loi LCAP a également modifié l’ancien « label XXe » qui répond maintenant à l’acronyme « label ACR » pour label Architecture Contemporaine Remarquable. Ce label, créé en 1999 au crépuscule du siècle, notamment pour répondre à une recommandation du conseil de l’Europe de 1991, qui avait pour objet de signaler une architecture du XXe siècle d’intérêt majeur, a finalement produit une famille variée d’édifices dont la liste est surtout le résultat de l’intérêt qui a été porté sur ce sujet par des conservateurs régionaux des Monuments historiques sensible à une architecture souvent mal considérée. Remarquons tout de même que certains édifices majeurs n’y sont pas, notamment des ensembles architecturaux de logements sociaux. Mais, le sujet n’est pas là, l’acculturation à l’architecture du XXe siècle étant un problème indépendant de la reconnaissance que procure ce label, qui en soit ne produit rien si des hommes ne s’attellent pas à le faire fructifier…
Depuis 1999 donc, ce label, qui n’entraînait aucune contrainte particulière n’existait en fait que par une circulaire initiale, signée par Catherine Trautmann, complétée ensuite par d’autres en 1999 et 2001 en guise de textes d’applications. Ce n’était une situation ni très pérenne, ni très lisible et le ministère de la Culture a voulu en stabiliser et renforcer le principe. L’inscription dans la loi était par conséquent logique et permet de donner quelques lettres de noblesse à un système qui n’est pas une protection mais doit susciter un intérêt du même ordre.
Une fois acquis le principe de l’inscrire dans la loi, il a fallu régler le principe de son champ d’application étant donné que son appellation « label XXe » interdisait de considérer la production du XXIe siècle, et qu’en 2017, ça pouvait commencer à poser des problèmes. En effet, l’objet du label n’est pas la « patrimonialisation » que donne le recul eu temps mais bien l’architecture contemporaine, d’où le système « glissant » qui a été introduit et qui se substitue à la version de 1999.
Cette nouvelle version du label s’applique donc aux édifices de moins de cent ans qui ne font pas l’objet d’une protection au titre des Monuments historiques, étant entendu que les anciens labels sont intégrés dans ces conditions. Évidemment, les esprits chagrins se plaindront que, de cette façon, des édifices labellisés perdent leur couronne mais on peut leur répondre qu’ils ne sont plus vraiment contemporains… que leur intérêt demeure et qu’il est alors temps de se poser la question d’une protection au titre des Monuments historiques le cas échéant.
L’autre apport important de la loi à ce label est d’imposer au maître d’ouvrage le signalement de tous les projets de modifications, transformations ou démolitions relatifs aux immeubles labellisés. De cette façon, l’administration peut émettre des recommandations (c’est prévu dans le texte) et le cas échéant entamer un dialogue pour que les évolutions demandées ne dénaturent pas la réalisation initiale…
Si par malheur le projet envisagé est trop destructeur, il y a alors la possibilité de supprimer le label et, de façon plus exceptionnelle, à la manière d’un ultima ratio regnum de lancer une instance de classement. Mais gageons que nos concitoyens maîtres d’ouvrages, tous maintenant acquis à l’architecture, feront que ce ne sera jamais nécessaire !